Accidents de trottinette électrique : l'Académie de médecine réclame une réglementation plus stricte – Libération

Un agent de la police municipale de Nice utilise un radar pour mesurer la vitesse des conducteurs de trottinettes sur la Promenade des anglais à Nice, le 11 juillet 2022. (Valery Hache/AFP)
«Chaotique». L’Académie de médecine ne mâche pas ses mots face au développement des trottinettes électriques en ville. Dans un récent rapport repéré par France Info, la société savante fait le constat d’une «défaillance» dans l’usage de cette mobilité douce. Source d’une accidentalité croissante, l’Académie relate une augmentation de 180 % du nombre de personnes blessées liées à ces engins de déplacements personnels motorisés (EDPM) entre 2019 et 2022.
Grande habituée des recommandations, l’Académie de médecine est composée de professionnels de la médecine, de la virologie ou encore du secteur pharmaceutique. Lors de la pandémie de Covid-19, elle émet plus d’une centaine de recommandations au gouvernement sur la marche à suivre pour venir à bout du virus. Face à la hausse des accidents impliquant les trottinettes électriques, les savants se sont attelés à ce sujet houleux.
Utilisée régulièrement par 10 % des Français, la trottinette fait pourtant l’objet de nombreuses véhémences. En cause : sa dangerosité. Fin août, le bilan partiel de la sécurité routière constatait 19 décès liés à la trottinette électrique depuis le début de l’année 2022. L’an dernier, c’est 22 personnes qui ont perdu la vie à cause de l’engin. Parmi elles, la mort d’une jeune femme en juin 2021 à Paris a poussé la mairie à mettre la pression sur opérateurs de trottinette en libre-service. La vitesse maximale a été limitée à 10 km/h dans certaines zones.
C’est trop peu, selon l’Académie de médecine, qui dénonce une «réglementation tardive», «un environnement souvent mal adapté» et «des contraintes floues imposées aux constructeurs». Les scientifiques s’attardent sur les trottinettes électriques mises en libre-service par des opérateurs privés depuis juin 2018 en France. La liberté totale des constructeurs sur le diamètre des roues et la largeur de la plateforme, souvent trop petits, représente un danger. «Poser un pied en arrière de l’autre fragilise un équilibre déjà perturbé par un centre de gravité haut placé. […] Le moindre geste, comme tourner la tête ou tendre un bras […], expose le conducteur à une chute.»
Une chute, en avant dans la majorité des cas, qui occasionne des blessures aux avant-bras, coudes et poignets, mais aussi à la tête. Traumatismes crâniens, fracture de la mâchoire et du nez sont bien plus fréquents après une chute de trottinette qu’à vélo. La trottinette électrique serait même le mode de déplacement le plus dangereux selon une étude de l’Université de Californie citée dans le rapport. Le nombre estimé de blessures par million de trajets est de 115 pour les trottinettes, 104 pour les motos et 15 pour les vélos.
Une dangerosité qui s’explique par la construction des trottinettes mais aussi le comportement des usagers. Dans deux tiers des cas, c’est un non-respect de la réglementation qui entraîne un accident (excès de vitesse, circulation sur le trottoir, pourtant interdite). Sur la route, 90 % des usagers des trottinettes en libre-service ne portent pas de casque. Tout comme les gants, l’Académie de médecine recommande de le rendre obligatoire. Elle préconise également de relever l’âge des conducteurs à 16 ans.
La société savante pointe également la qualité des voiries, souvent dangereuses pour des roues étroites, et souhaite que l’aménagement urbain tienne compte de ce nouveau mode de mobilité. Ce phénomène sociétal est devenu, en quelques années, un «enjeu de santé publique».
© Libé 2022
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